Que vous rappelle le dernier voyage du président Félix Tshisekedi à l'étranger ? Le peuple s'interroge (tribune d’Aristote Ngarime)
En relations internationales mondialisées, il existe plusieurs sortes de visites pour raffermir les liens entre Etats, notamment la visite d'Etat, la visite officielle, la visite de travail, la visite privée ou la visite de courtoisie.
Les visites d'Etat incarnent le degré le plus élevé des relations entre Etats. Planifiées au moins six mois à l'avance, elles sont vouées au développement économique, culturel, diplomatique, militaire etc...
Or, là, le président Félix Tshisekedi vient d'innover en mal, puisqu'il prône un nouveau type de gouvernance en Afrique calqué sur la visite extérieure de prestige, sans un contenu mûri. C'est une visite en défaveur du pays.
En effet, avec la rigueur de la définition de chaque visite reprise en diplomatie, notamment, la visite d'Etat, la visite de travail, la visite officielle, on comprend que la visite effectuée récemment en dehors du pays n'en est pas une dans la nomenclature conventionnelle.
Pour mémoire, en relations internationales mondialisées, dans un sens ou dans un autre de la visite, lorsqu'un président de la république se déplace, il s'arrange de se faire accompagner dans sa délégation des meilleurs pour l'objet de sa mission. Par exemple les opérateurs économiques (investisseurs compris), les gestionnaires des secteurs productifs, les chercheurs scientifiques ; chaque groupe pour le domaine qui le concerne.
Le chef de l'Etat constitue sa délégation avec une crème d'élites de son pays pour des échanges visant à renforcer le carnet d'adresses et, généralement, à signer des accords, des contrats.
Ainsi en est-il des relations diplomatiques de nos jours.
Pour s'en convaincre, il suffit de scruter le dernier voyage du président français Emmanuel Macron au Brésil du 26 au 28 mars 2024.
Quelle a été la nature du dernier déplacement à l'étranger du président Félix Tshisekedi ?
La toile s'est enflammée le dimanche 7 avril 2024, à 4 heures du matin, lorsque l'information faisant état de son énième voyage a commencé à circuler. Normal : personne n'a indiqué sa destination demeurée d'ailleurs intraçable, suscitant la curiosité.
Où est le président Félix Tshisekedi ? Séjourne-t-il dans quel pays ? Quelle est la nature de son voyage ?
Dans une démocratie, mieux une république, la loi de la redevabilité envers le souverain primaire est obligatoire. Faute de précisions, des spéculations légitimes étaient rapidement déduites.
D'aucuns ont pensé alors qu'il est au Rwanda, d'autres en France, d'autres encore en Belgique.
Le seul propos de sa porte-parole se résume à reconnaître que le président de la république est à l'étranger « pour des dossiers urgents du pays ». C'est tout.
C'est comme si on méprisait le congolais interdit de savoir où se trouve le chef de l'Etat. Etrange. Une faute diplomatique.
Le dernier voyage du président Félix Tshisekedi
Son récent voyage à l'étranger s'inscrit dans le registre des voyages stériles, improductifs, vains qui saignent à blanc le trésor public dans un pays où les fonctionnaires de l'Etat sont impayés, où il y a presque cessation de paiement, où les professeurs, les médecins, les militaires et policiers sont impayés.
Dans un pays où tout est urgent, le constat est sidérant : le gouvernement central est démissionnaire, le bureau définitif de l'assemblée nationale est en gestation, le processus électoral pour les gouverneurs de province et sénateurs est en cours.
Dans un pays agressé militairement, où l'ennemi progresse, où l'insécurité est grandissante à Goma comme à Kinshasa, il est incommode pour un président de la république de s'octroyer un voyage de 6 jours à l'étranger sans en informer le souverain primaire, voyage dont le motif demeure un mystère.
A la limite, un tel geste relève du mépris à l'endroit des Congolais(e)(s).
Le Congo mérite mieux.
Aristote Ngarime
Chercheur en sciences politiques et relations internationales.