Liberté de la presse : la chronique musicale est-elle une sphère sous contrôle des artistes ?

Liberté de la presse : la chronique musicale est-elle une sphère sous contrôle des artistes ?
Tonton BEV, chroniqueur musical et patron de la chaîne Youtube BEV officielle

Le monde a célébré ce vendredi 3 avril la journée de la liberté de la presse. En République Démocratique du Congo, quand on parle de la presse, l’on a tendance à ne voir que le côté politique ou économique. Cependant, la chronique musicale fait également partie intégrante de la presse. Contrairement à ce qu’on peut croire, certains chroniqueurs ont réellement fait des études en communication ou journalisme.

Nous avons eu un bref échange avec tonton BEV ou tout simplement BEV, licencié en science de l’information et de la communication, chroniqueur musical sur la liberté de la presse sous l’angle du journalisme musical.

 

Le monde a célébré ce 3 mai la journée de la liberté de la presse. Quel est votre regard global sur l'exercice du métier de journalisme dans le pays ?

Déjà le pays s'appelle la République démocratique du Congo donc, la démocratie. La liberté de la presse aujourd'hui est un peu complexe. Tout le monde devient journaliste parfois sans formation ni expérience. On ne sait plus qui est vrai qui est faux. Mais, s'il faut parler de liberté, aujourd'hui tout le monde dit ce qu'il pense sans être inquiété. En ce terme, c’est la liberté et c'est une réussite au Congo. Seulement, plusieurs personnes en profitent pour diffamer, déraper voire insulter. Ce qui est déplorable. Sinon la liberté de la presse évolue assez bien au Congo.

 

Vous êtes spécialisé dans la musique, peut-on dire que le journaliste musical exerce son métier sans contrainte ?

En ce qui concerne la chronique musicale ou le journaliste musical ça va. Ce n'est pas comme dans le monde politique. Mais, la majorité de nos artistes musiciens n'accepte pas les critiques. Nous sommes dans la chronique et nous ne nous limitons pas à poser des questions. Nous analysons aussi les faits. Plusieurs artistes n’apprécient pas cette manière de faire. Cependant nous sommes libres. Le mal c’est d’insulter. Tant qu’on analyse et que chacun donne son point de vue, il n’y a pas de problème. Le plus important c’est de se baser sur les faits.

La musique évolue avec les plateformes numériques. Au Congo, les gens prennent un téléphone et deviennent chroniqueurs. Avez-vous une organisation du genre MLRDC pour la chronique musicale ?

J'aime cette question parce que c'est vraiment un sujet très important. Nous sommes nous-mêmes en train d'aborder cette question de chercher à nous organiser, dans la chronique sur la toile. Aujourd'hui tout le monde est devenu journaliste ou chroniqueur, expert ou analyste. C'est un milieu qu'il faut réguler avec rigueur. Monsieur Bosembe doit beaucoup veiller sur ce qui se passe dans les réseaux sociaux parce que c'est pratiquement la racaille dans la chronique en ligne. Il suffit de prendre un téléphone, te mettre à parler et on t'appelle journaliste partout. C'est scandaleux.

 

Comment évoluez-vous ?

On aspire à être une presse sérieuse. Une presse qui n'a pas de parti pris et qui traite les informations avant de les diffuser, nous appuyant sur les faits. Si vous êtes vantés par les faits vous l’êtes et on en parle. Si vous ne l'êtes pas, on ne peut pas faire la magie. On va faire notre travail.

En ce qui me concerne, j’évolue bien. On essaie de faire la presse autrement avec la structure DAB. C'est l'association de trois chaînes YouTube, nous nous sommes mis ensemble pour créer une structure de communication. Demeure Officielle, c'est la chaîne de Demeure Nyangi, Afrika Mobimba Télévision la chaîne de Thierry Mombaya et puis Bev officielle la chaîne de Bev, ce qui nous donne D-A-B.

 

La musique marche souvent avec la polémique. Le journaliste professionnel peut-il cohabiter ou être auteur de la rumeur et la polémique ?

Bien évidemment. Si vous posez cette question à plusieurs chroniqueurs, ils vous diront non, la musique ce n'est pas la polémique. Je vais vous dire sincèrement, la musique marche avec la polémique. Cette polémique doit être une polémique qui incite les gens à aller consommer régulièrement les artistes. Ces derniers gagnent de l'émulation alimentée par cette polémique. Je parle d'une bonne polémique, celle qui pousse à avoir une guerre loyale. C'est également basé sur la rumeur.

Si nous tombons sur une rumeur, nous pouvons évidemment la diffuser au conditionnel. On peut avoir une rumeur qui dit Fally Ipupa est devenu fou. Si tu n'as pas encore assez d'éléments pour affirmer, il faudra dire : Il semblerait ou il paraîtrait que Fally Ipupa est devenu fou. Ça sécurise jusqu'à la confirmation ou infirmation.

 

"La presse au service de la planète : le journalisme face à la crise environnementale" est le thème de cette 31e édition. Comment le journaliste spécialisé dans la musique peut-il accompagner ce thème ?

Si nous avons des artistes conscients  et des chroniqueurs conscients, nous pouvons marteler sur le sujet. Il faut organiser des formations et des ateliers sur cette question pour éveiller la conscience des gens. Mais encore, il faut se poser la question : est-ce que l'homme congolais est prêt à assister à ces genres de débat ? C'est l'un des problèmes que nous rencontrons au Congo. Le niveau intellectuel est un peu... Rire ! Je préfère ne pas choquer les gens. L'homme congolais doit se former et se cultiver. Il doit beaucoup lire et se mettre à jour, avoir cette envie-là de comprendre comment le monde évolue. Nos artistes musiciens sont des peintres de la société, des leaders d'opinion, des éducateurs de masse. Ils ont donc ce lourd fardeau d'encadrer, de former voire de composer des chansons autour de ces questions. Et nous les chroniqueurs, pourquoi ne pas faire ce travail d'accompagnement pour faire évoluer la culture et aider à comprendre les questions de l’environnement.

Votre dernier mot ?

J'espère que mes réponses n'ont pas choqué les gens. Pour ceux qui ne me connaissent pas je suis Tonton Bev, le transfert le plus cher de la presse congolaise, l'international, 12e merveille, le motivé de toute une génération, monsieur Auto-tune, NFL, chemin de la vérité, intellectuel pratiquant, etc. Je ne suis pas au milieu du village mais au-dessus du village.

Pour me suivre, retrouvez-moi sur Youtube sur la BEV officielle. Merci !

Propos recueillis par Eddy Kazadi